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Plastique sonore

Ma pratique du son a débuté dès mes premières performances au Stollwerk de Cologne en 1982. Elle a cependant pris une forme autonome à partir de 1985 à l’occasion d’une bourse de recherche, qui m’a conduite à intégrer l’atelier Son de la Villa Arson à Nice. J'y ai rencontré Lars Fredrikson, dont la perception et le propos plastique m'ont fait prendre un virage radical et dont l'écoute est devenue très complice.  

 

J'ai commencé à utiliser un générateur de fréquences pour créer de la matière sonore, pour la modeler, transformer en continu. J'ai ensuite fixé ces sons sur bande magnétique pour les présenter sous forme  de simple  diffusion stéréo.

 

En me tournant donc exclusivement vers le son comme matériau , j'ai pu  transgresser la fixité et l'immobilité de la sculpture et du dessin; les rendre élastique et poreux.  

 

Voilà pour ma manière de pratiquer, penser le son et l'écoute! Voilà pour mes fondamentaux!

 

Or, à partir de 1996, j'ai commencé aussi à m'intéresser à l'interaction son/espace (avec une certaine prédilection pour des espaces courbes; des lieux froids, nus, semi-obscurs [des citernes d’eau par exemple]). 

 

Comme ces types de sons entrent en tension avec l’architecture et l'atmosphère localecomme ils s’enrichissent en conséquence des qualités tonales des matériaux présents et du climat ambiant et comme cela génère des « œuvrer uniques » non reproductibles, il m’est impossible de les présenter ici.

OT installation sonore in L'Autre Galerie Heijblum Nice Eléonore Bak © 1998

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Installation sonore 

in L'Autre, exposition du groupe Alerte,

Galerie Heijblum Nice 1998

                                           

Des fréquences pures sont diffusées à l'intérieur d'une ancienne citerne d'eau d'arrosage, où elles entrent en mouvement circulaire. Le relief sonore se typifie grâce aux micro-sillons laissés par l'eau sur les parois et dégage une forte dimension tactile.

 

Il faut voir aussi comment elle dessine l’infini, ce huit allongé, étiré qui semble se tortiller dans ses vibrations. Puis comment elle récupère des « habitations » pour y loger ses sons. Je me souviens d’une citerne à la campagne, vous voyez, ces bassins pour les paysans. Pour leurs légumes. On y entrait et on pouvait difficilement y séjourner. Juste l’oreille qui n’avait pas l’habitude de se faire maltraiter. Mais à peine parti, on revenait sur ses pas. Le métissage avait opéré. Quelle évidence ! Il se passait là quelque chose. Il suffisait de toucher les parois sèches. Et d’écouter avec les mains. 

 

Sophie BRAGANTI Sculpter le Son, Paris, Revue Verso, 2002

OT installation sonore in Nature / Contre Nature Villa Arson Nice 1996 Eléonore Bak © 1996

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Installation sonore 

in Nature / Contre Nature

Villa Arson Nice 1996

                                         Dispositif technique dissimulé derrière une membrane

OT installation sonore et lumineuse Galerie 3bisf  Aix-en-Provence Eléonore Bak © 1995

 

À partir de 1998  — et quasi en parallèle à mes expérimentations architecturales et atmosphériques —  je me suis aussi intéressée à la

  • dimension structurelle des sons

  • simulation de leur éventuelle forme, notamment à l’aide des outils de modélisation développés par ACROE (Association pour la Création et la Recherche sur les Outils d’Expression) de Grenoble  [1], où j'ai rencontré Annie Luciani, dont le propos scientifique et artistique et la créativité instrumentale et ambiante m'ont non seulement interpellées, mais stimulées et dont l'écoute reste immensément  précieuse,

  •  

  • et bien plus tard ( 2009) à la

  • spatialisation sonore (Surround, Wave-field-synthesis [2]).

Comme la simulation nécessite des dispositifs technologiques adéquats et comme la spatialisation nécessite de très bonnes conditions d'écoute et des espaces dédiés, il m’est là aussi impossible de reproduire les résultats sur ce site web.

J’ai fait donc le choix de ne montrer

  • qu'un extrait de la série des Unruhe («inquiétudes») réalisé avec un générateur de fréquences. J'ai débuté cette série lors d'une résidence artistique à Cracovie en 2008. 

  • qu'un extrait issu de la série des «seuils d'écoute»: Ondulatoire, qui a été réalisé en 2000 avec un générateur de fréquence (REAKTOR, native instruments) commence avec un «apparent silence», qui correspond en réalité à des sons à peine, voire difficilement audibles. Ce seuil, que je présente sous forme d'effet d'annonce dure en réalité plus longtemps (17 secondes sur l'enregistrement original). Je l'ai raccourci pour des raisons évidentes;

  • que quelques extraits de mon travail sur la morphologie sonore cf. YR, Huile, Piih, Structure d'écoute, Scroll réalisés en 1998 avec un synthétiseur Roland (enregistrement original sur magnétophone REVOX); publié in ERRATUM II, revue sonore sur une proposition de Joachim Montessuis, Besançon (1999), Distribution Metamkine Rives. Il faut d'ailleurs noter que c'est bien la seule et unique fois que j'ai accepté que ces types de sons soient édités sur support CD.

J'ai également choisi de montrer

  • l'une de mes premières «plastiques sonores» cf. Tibet, réalisé en 1985 avec un générateur de fréquence (enregistrement original sur magnétophone REVOX).

[1]  Il s’agit d'outils développés à partir d'un concept original de Claude CADOZ et Annie Luciani, dont « Genesis, qui est un outil destiné à la modélisation et à la simulation numérique de structures sonores et d’organisations musicales; Mimesis, un outil destiné à la création et à la simulation du mouvement visuel et de Telluris, qui est voué à la création multi-sensorielle. J'ai pu pratiquer ces outils lors d'un Atelier organisé par ACROE en 2001. Mon projet était d’explorer des formes sonores obéissant aux repères cartésiens (du type objet sonore) et de trouver éventuellement une alternative à ce modèle. Grâce aux modèles physiques (interaction masse, ressort, sol), j’ai créé des petites structures oscillatoires visuelles, équipées de microphones. L’interface était donc à la fois visuelle et sonore. Parce qu’il s’agissait d’une oscillation sonore et visuelle dans un espace virtuel en m3 le son et l’image pouvaient disparaître de l’écran, tout en continuant d’agir, comme dans un espace réel ». [ Pour citer ce texte: BAK Eléonore Habiter l'in-vu, Formes de visualisations sonores, thèse de doctorat en architecture préparée au sein du laboratoire CRESSON/ENSAG, école doctorale 454 Sciences de l'homme du politique et du territoire, Université de Grenoble, Ss la direction de CHELKOFF Grégoire et soutenue le  30 juin 2016  à  l'école nationale supérieure d'architecture  de Grenoble p 234 ]

[2] Outre le travail de spatialisation en Surround piloté par logic pro en 7.1, j'ai pu expérimenter le dispositif holophonique de Centrale Supélec. Il s’agit d’une salle carrée de 5 m3 équipée de 76 (voire 120 et plus) haut-parleurs alignés à l’horizontale où l’on peut, grâce à un holoplayer, sorte d’interface de spatialisation, jouer 16 sources à la fois et simuler des trajectoires sonores, ce qui nous donne par exemple l’impression de marcher à côté de quelqu’un, tout en trempant dans un paysage sonore vivant et réaliste. Je me suis servi de ce dispositif pour créer des volumes sonores à l'intérieur desquels se produisaient des densifications momentanées (diffusion de différentes fréquences pures sans que l'on puisse identifier avec précision ni leur provenance, ni leurs trajectoires).

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Installation sonore et lumineuse 

Galerie 3 bis f Lieu d'art contemporain 

 Aix-en-Provence 1996

                                           

 

P R O M E N A D O L O G I E  

pour la Galerie 3bisf, situé dans l'ancien hôpital psychiatrique pour femmes Montperrin, devenu depuis 1982 un lieu d’exposition et une résidence d’artistes.

 

                                                                                         Des loges  — sortes de cellules étroites de 2,5 x 3,5 m  (murs en pierre recouverts d’un enduit lisse), équipées d’une seule fenêtre d’aération et de portes métalliques très lourdes, qui coupent ces séjours hermétiquement du reste de l’espace — sont ordonnancées en arc-de-cercle, afin qu’un surveillant puisse superviser depuis un unique poste d’observation la sortie en groupe de l’ensemble des patients (principe panoptique). Le couloir en courbe est très réverbérant du type galerie des pas perdus et fonctionne comme un conducteur sonore avec un fort potentiel d’échappement. Comme il favorise en plus la formation de courants d’air, dus à l'aménagement en arc-de-cercle et aux différences de température entre le hall d’entrée et la galerie principale d'exposition, il fonctionne aussi comme un générateur d'ambiances, puis comme un tuteur pour les gestes et la perception. L'aménagement rythme non seulement la promenade (profondeur sonore crescendo/ decrescendo; rapport public/privé), mais occasionne la formation de nœuds sonores dus aux effets d'écho (voir aussi doubles sorties des locataires, voir l'image) et de circulation des masses d'air savamment orchestrés pour réguler les déplacements et les postures (effet de collier de perles), voire pour enchaîner les individus afin de les soumettre à un sens unique.

 

 

Des enregistrements de fréquences étaient diffusés depuis la toute dernière loge du pavillon 3 bis f. Les sons se répandaient dans le couloir en courbe, qui fonctionnant comme une caisse de résonance, que j'ai d'ailleurs modelé en me servant notamment des cellules restantes comme amplificateurs naturels. En ouvrant/fermant complètement, partiellement les portes de ces cellules (principe des pots acoustiques), j'ai tout à la fois produit des effets locaux et rythmé l'acoustique générale. J'ai ensuite invité le public à jouer avec ce dispositif afin qu'il puisse lui-même découvrir le travail de l'espace. 

 

Pour appuyer la dimension atmosphérique, j'ai plongé toutes les loges dans l'obscurité. Le couloir restait assez sombre par rapport au hall d’entrée et à la galerie principale d’exposition. Aussi y ai-je aménagé différentes catégories de taches lumineuses: une partie de ces spots symbolisait la sortie des anciens locataires, l’alignement régulier des corps; d'autres fonctionnaient comme des points d'écoute désignant alternativement  des  paliers  de distribution sonore  ou  des zones de présences particulières, dont notamment des densifications et nœuds sonores.

Enfin, j'ai proposé une partition tactile, c'est-à-dire un relief en papier de 2 mètres de longueur et de 1 mètre de large, lui même logé dans une sorte de caisson à fente ( 2 x 0,30 m) permettant au public d'y glisser ses mains pour l'explorer aveuglément. 

 

Unruhe 7 - Eléonore Bak © 2015
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Modulations avec un Générateur de fréquence (REAKTOR Native Instruments)

Ondulatoire - Eléonore Bak © 2000
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Modulations de la matière avec  un générateur de fréquence (REAKTOR Native instruments) commence avec une plage de fréquences inaudibles (originairement de 17 secondes) 

Yr, Huile, Piih, Structure d'écoute, Scroll - Eléonore Bak © 1998
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Modulations de la matière avec un synthétiseur Roland

Tibet - Eléonore Bak © 1985
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Modulations de la matière avec un générateur de fréquences

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